Divers

Chapitre 5 Suite

– Ce n’est que moi, soufflait-il

– Moi ? Moi ?  groumais-je en l’affrontant du regard. Il semblerait que le souvenir me fasse défaut. Votre voix me laisse indifférente et votre contention, de marbre. Je n’ai pas pour habitude d’oublier les hommes qui ont croisé ma route, partagé mon intimité. À moins que vous ne soyez pas de ceux qui savent se comporter avec respect ? Si vous dites vrai et que je sois subitement prise d’amnésie, alors j’ai dû vous considérer comme un malappris. Mon cerveau est un ami sûr, qui veille à me protéger des spectres, des hommes que je considère comme mort. Histoire de ne pas commettre les mêmes erreurs, vous voyez ? Veuillez desserrer l’étreinte ou je n’aurais pas d’autre choix que de crier.

L’esprit embrumé, je ramassais tout mon courage, mes forces et me redressais calmement.

– Que fais-tu avec cela ? ajoutait-il, ignorant mes propos, l’amulette au bout de son index. Tu es folle ou bien, te serais-tu expatriée trop longtemps dans les déserts de glace pour ignorer l’affaire qui court sur cet objet ?

– Mes parents m’ont recommandé de ne pas parler aux inconnus, répondais-je.

Je reprenais le bijou avec douceur. Je froissais l’aéroplane ; le glissais entre son torse et son polo ; lui rendais son oreillette, et partais m’installer à quelques tables de là. M’isoler, oublier sa présence et me concentrer sur les recherches. Difficile mais pas impossible. Ne dit-on pas que la musique adoucit les mœurs ? Le rythme et l’harmonie sont propres à pénétrer l’âme écrivait Platon dans « la République ». À chacune de mes ruptures, j’y associais une mélodie. Pour lui, mon choix s’était porté sur « A Song For You ».

Texte définitif : XXIX.I.MMXXIII