Lettres épistolaires

Lettre anonyme n° 19

Ambiance d’écriture : 

Humeur : rythmée et enjouée

Cher XXX,

Si notre rencontre sur le parc de stationnement vous a ébranlé, sachez que je me reproche mon assaut et ma promptitude. J’ai agi sans finesse et sans prévenance. J’ai porté les premiers coups : un direct, un crochet, un uppercut, sans vous laisser le temps d’enfiler les gants et le protège-dents. Vos mouvements de tête encaissaient les chocs mais votre regard, hagard et perçant, me défiait.

Comme deux professionnels du ring, nous avons combattu durant douze rounds sans coach et sans massage avant les reprises. Nous nous sommes affrontés avec courage, ténacité et respect.  Ni l’un, ni l’autre, a embrassé le macadam par KO. La cloche a retenti et nous nous sommes quittés, l’esprit troublé voire tourmenté.

Et puis, contre toute attente, vous avez trouvé les mots avant moi. Votre lettre du 6 octobre a été lue le 7, en milieu de nuit. Comme à mon habitude, je l’ai lue plusieurs fois.  La première lecture est dynamique, sans ambiance musicale. La deuxième est plus lente. Je cherche les sous-entendus. Je repère les répétitions (indice important pour mesurer votre humeur), je souris, je ris et je recommence une nouvelle fois, juste pour le plaisir.

Je me suis interrogée longuement si je devais me confondre en excuses. Mais finalement, je n’en ferais rien. Si ma candeur est à l’origine de cette approche brutale, votre lettre du 30 avril a contribué à me croire démasquée.

« Si je m’avance sur votre prénom en 7 lettres, vous répondez à la question grand ami ? À moins que cela ne soit que 4 lettres, Cory ».

Bien sûr, je ne vous en veux pas. Comment le pourrais-je ? Vous me lisez depuis le vingt-sept septembre de l’année passée et vous consacrez, encore aujourd’hui du temps à mon exaltation.

Toutes nos missives témoignent que nous jouons dans un monde virtuel. La vérité, la chimère, s’entremêlent. C’est à nous de juger de la véracité des propos.  Et tant pis si nous comprenons autre chose, que ce que l’auteur de la missive voulait laisser entendre. N’est-ce pas là ce côté tendancieux qui nous anime et nous amuse ? Maintenant, qu’il vous est possible de mettre un visage sur ces mots, faudrait-il qu’il en soit autrement ?

En écrivant « Ne plus répondre, c’est renoncé à ….. « , vous calmez une honte qui m’habite depuis lundi 27 septembre. D’ailleurs, n’est-ce pas étrange que notre rencontre physique ait eu lieu le jour où vous avez reçu la première missive ?

Alors voilà ce que je vous propose. Mettons un terme à la saison 1 et écrivons la saison 2.

Imposons-nous un autre lieu. Pourquoi pas les vallées et les sommets ? Je suis la mer, vous êtes les montagnes, d’après nos plaques d’immatriculation. Habillons-nous pour affronter les températures. Enfilons manteaux, bonnets, écharpes et chaussons les après-skis. Autorisons-nous quelques taquineries. Acceptons nos exubérances sans nous juger.

Je n’abandonne pas l’idée de vous confier quelques aventures personnelles. Je me réjouis, par avance de vous voir godiller entre ma fiction et ma réalité. J’espère que vous en ferez de même. Hâte de vous connaître davantage…

Nota Bene : oui, j’ai un grand ami. Il me lit mais n’a fait aucun commentaire sur les lettres anonymes… Et vous ? Avez-vous mis au courant votre compagne de nos échanges ?

Teste définitif : XIV.X.MMXXI

Lettre 19

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