Lettres épistolaires

Lettre anonyme n° 6

Ambiance d’écriture :

XXX,

Sachez que je vous lis avec beaucoup d’attention et d’intérêt. Vos missives déclenchent souvent des sourires. Ce n’est pas de la flatterie d’écrire que vous êtes un adversaire de qualité. Vous me divertissez. Vous m’encouragez dans mon projet. Vous m’indiquez galamment quelques pistes et insistez, lorsque j’esquive à vous indiquer « une date ». Vous l’aurez compris, je prends plaisir.

Nonobstant, restons prudents. Nous ne devons pas accepter tout de l’autre sous prétexte que nous évoluons dans un espace virtuel. Je ne veux pas que vous soyez à ma merci. Cessez donc de penser cela. Je vous imagine mon égal, même si, votre destin est de rejoindre la case prison dans quelques jours.

Comment avez-vous pu imaginer que je serais prête à vous offrir mon prénom sans que vous mouilliez la chemise ? Cette découverte mettrait en péril mon identité. Pourquoi vous aurais-je servi cet indice sur un plateau d’argent ? À vouloir absolument mettre un visage sur mon personnage, vous risquez de vous créer de la peine, voire de la déception. Vous pouvez remonter le temps si cela vous procure une allégresse, mais la réponse ne se trouve pas dans vos souvenirs. J’en suis profondément désolée. Je ne suis ni Kler, ni une autre.

Concernant mon échange avec Pierre, il fut bref. J’ai réfléchi, durant une insomnie, à ce que j’allais faire… Le lendemain, tout m’est apparu très clair. Jouer le Cupidon était une fabuleuse façon de passer une belle journée. Sa réponse montre qu’il a apprécié mon côté chevaleresque. Hahaha.

Je garde précieusement cet échange dans mon téléphone. Il est inattendu. Et j’aime les petites parenthèses de ce genre. Grâce à elles, je rêve.

Puisque vous y mettez du vôtre, et que la société dans laquelle nous évoluons donne, davantage du crédit à la « beauté » qu’à l’esprit, je vais vous concéder quelques révélations sur mon physique. Mais attention ! Cette confidence doit pouvoir vous rassasier durant plusieurs mois. Pouvons-nous conclure, qu’une fois que vous aurez fait lecture de ce qui suit, le sujet sur mon apparence est clos ? Je prends le risque. Alors voilà : je ressemble davantage à Ursula qu’à la petite sirène ; plutôt à la Reine Grimhilde qu’à la merveilleuse Blanche Neige. Et mon allure, peu délicate, fait penser à Médusa. Puis-je espérer d’autres missives malgré mon portrait disgracieux ? Je comprendrai que vous ne donniez plus suite. Après tout, que dirait votre entourage, s’il apprenait que vous complotez avec la laideur ?

Si je suis parvenue à déchiffrer votre message codé, le verbe « étriller » reste un mystère. S’agirait-il de brosser une œuvre ? Mais dans quel(s) but(s) ? J’imagine que cette action intervient en fin de travail ? Vous brossez pour lustrer ? Vous brossez pour atténuer des imperfections ? Vous brossez les fibres avant de les ajouter au plâtre ?

Je réfléchis très sérieusement à solliciter un staffeur pour façonner l’objet que va devoir réaliser Balthazar. S’il pouvait ressembler très précisément à mon idée, il aurait toute sa place dans mon bureau. Mais je mets la charrue avant les bœufs…

Vous avez raison concernant l’horoscope. Cette industrie est cocasse et délassante. Les radios ne sont pas synchros sur le contenu. On vous annonce tout et son contraire pour une même journée. C’est pratique, je fais mon tri. Oui, je l’avoue. Lorsque je tombe dessus, je tends l’oreille. Incroyable non ?

Dans le monde réel, les hommes s’apprêtent à fêter Noël et le Nouvel An. Pour ces raisons, je fais le choix de vous laisser en liberté provisoire.

Je vous recontacterai le 02 janvier. Jour de votre incarcération. Préparez-vous. Le gage ne sera pas de tout repos. Je tiens à vous surprendre.

Nota Bene : le message codé était une grande idée. Bien joué !

Météo : aucune tornade n’est prévue par les spécialistes dans notre région. Alors nous pouvons nous détendre…

Humeur : très bonne.

Date de rendu : 29 juin 2021

Texte définitif : XVIII.XII.MMXX      

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