Lettres épistolaires

Lettre anonyme n° 10

Humeur : douce et rythmée au son du saxophone

Cher XXX,

Des résolutions ? Ciel, non ! Pourquoi m’infliger de telles contraintes. Je m’en tiens à mon bon vieux serment…

Concernant l’avidité que vous semblez déceler, je ne désire collecter que vos impressions sur vos échecs et vos réussites professionnelles. Lorsque nous concédons une révélation, nous le faisons de notre propre initiative. Vous vous censurez de peur d’être jugé. Je me censure de peur d’être démasquée.

Le jeu prend des tournures impensables. Votre courage, votre curiosité, mon audace et mon imaginaire, sont à l’origine de tout cela. Je vous lis et vous imagine un passé, un présent. Cela me suffit. Je n’en veux pas davantage. Balthazar est un mélange de chimères et de vérité. Est-ce que cette mixture sera la clé d’une réussite ou d’un échec ? Réponse le 29 juin.

La première fois que j’ai entendu parler de votre talent, je fus intriguée par cette ferveur exprimée avec tant d’enthousiasme. Ce petit monde avait l’air tellement fier de vous « posséder ». Vous étiez là, parmi eux, comme un trophée en chair et en os.

Je me suis dit :

–  tiens ! Voilà un personnage qui pourrait m’intéresser. Il est reconnu par ses pairs, il est apprécié de ses collègues mais est-il aussi extraordinaire que le dit la légende ?

La seule et unique fois où nous avons interagi, vous avez surgi de nulle part et m’avez terrorisée. Je fus sur mes gardes durant tout l’échange, apeurée comme une biche peut l’être, lorsque le chasseur est sur le point de la mettre en joue. C’est durant ce court moment, que j’ai pu observer vos mains. Le ….. était encore présent à la base de vos ongles et votre voix me parut agréable. Je suis incapable d’affirmer que vos yeux sont d’un marron feuille-morte ou d’un vert-sapin. Au fond, vous n’êtes pas plus qu’une silhouette et un renom.

J’ai imaginé que vous pourriez être mon jouet, mon héros, le temps de, deux ou trois échanges. Or, le temps passe et je suis là, à vous écrire des banalités dont le commun des mortels pourrait se moquer.

Le jouet s’est révélé être un adversaire dont je n’avais pas imaginé les qualités, tant je les estimais surfaites… Je ne sais pas quoi penser de vous. Pourquoi m’aidez-vous dans mon projet alors que vous n’avez rien à y gagner ?

J’écris et vous écris par plaisir. J’écris et vous écris parce que je suis libre de le faire.

Tout comme vous, vous avez la liberté de me lire sans me répondre. Vous êtes libre de ne pas ouvrir les mails ou même, de considérer que mes lettres sont des objets indésirables. Vous pouvez à tout moment dire « stop » dans un aparté. Vous êtes libre de jouer le facteur, en confiant mes blablas à l’un de vos acolytes, sans que j’en sois informée et l’implorer de vous remplacer dans la tâche. Vous pouvez, aussi, m’imposer votre rythme et convenir que je ne dois plus vous contacter avant le mois d’avril… L’idée de vous importuner me déplaît. Vous semblez crouler sous le travail et les obligations. Vous n’avez pas à me prouver que vous êtes un homme révérencieux ! Votre débonnaireté a déjà fait ses preuves.

Je suis ravie d’avoir déclenché un soubresaut juste en évoquant la vanille. Ces instants sont assez magiques. Non ? Le temps s’arrête quelques secondes et les neurones travaillent tant, qu’ils vous font perdre la tête. J’aspire à ressentir et à créer de telles émotions… Nonobstant, je ne suis ni Kler, ni cette collègue avec qui vous avez partagé des déjeuners… Voilà, deux réflexions mal menées.

La statue d’Aïn Ghazal est une découverte extraordinaire. 9 000 ans nous séparent. Ce n’est pas rien.

Son regard est effectivement fascinant et retient l’attention du passant qui l’observe bien. Mais pas que. Sa bouche, cousue, interroge. L’expression du visage, les bras non démarqués, le profil malbâti, me déstabilisent. Je l’adore, un point c’est tout. Et si j’avais eu cette chance de rencontrer son créateur, assurément, il aurait conquis mes yeux, mon cœur et mon esprit.

Vous vous trompez lorsque vous pensez que votre signe est un signe de feu. La vierge est un signe de terre. Alors navrée, mais je vous échappe un peu plus et poursuis mon chemin sur le plateau de jeu.

Nota Bene : Pas de frustration à l’horizon. Avril, mai, jamais… Si vous ne réalisiez pas mon talisman fétiche, si vous ne donniez plus signe de vie, je continuerais à écrire ; avec un certain vague à l’âme. Peut-être ! Mais après tout, jeter des bouteilles à la mer n’est pas un crime… 

Texte définitif : XXIII.I.MMXXI

Lettre 10

Laisser un commentaire